
Denis Simard, professeur à la Faculté d'éducation de l'Université Laval
Face aux mutations contemporaines du rapport au savoir, quels sont les défis de la profession enseignante au collégial? Cette réflexion essentielle, qui jette une lumière sur les défis actuels – et à venir – de la profession enseignante au collégial, a été soulevée par Denis Simard, professeur titulaire à la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université Laval, lors d’une conférence présentée à l’occasion du congrès de la Fédération de l’enseignement collégial (FEC-CSQ).
Par Pierre Avignon, conseiller FEC-CSQ
La conférence de Denis Simard, qui explore les mutations contemporaines du rapport au savoir et leurs effets sur la profession enseignante au collégial, a donné le coup d’envoi du 14e Congrès de la FEC-CSQ, qui se tient jusqu’au 6 juin 2025, à Rivière-du-Loup, sur le thème Du cœur au savoir.
Devant plus d’une centaine de participantes et participants, le conférencier a rappelé l'importance de l'institution collégiale et de la formation générale, affirmant que le cégep est un maillon indispensable du système éducatif québécois. Il a ensuite affirmé être bien conscient des problèmes communs qui traversent tous les ordres de notre système d’éducation. Ce dernier est en effet confronté à de multiples mutations d’ordre économique, politique et écologique, mais également informationnel et technologique.
« Que la profession enseignante soit devenue plus difficile, il ne faut pas s’en étonner! Nos étudiantes et étudiants, comme nous, sont bousculés à l’échelle individuelle et collective, car nous vivons dans un monde incertain. Les profs doivent donc composer avec des jeunes souvent distraits par les écrans et ayant des niveaux de concentration et d'attention réduits, sans compter le sens accordé ou non aux études », a dit Denis Simard.
Quelle place est accordée à la valeur formatrice et émancipatrice des savoirs?
« On a toujours accordé beaucoup d’importance au savoir, notamment en vue de former la raison », a rappelé le professeur de l’Université Laval. Après avoir retracé les grandes lignes de l'histoire de la croyance en la valeur formatrice et émancipatrice des savoirs dans la tradition éducative et pédagogique occidentale, il a expliqué en quoi cette croyance est centrale pour la formation intellectuelle et la raison critique. Or, les mutations en cours ont ébranlé la croyance en ces valeurs.
Des pistes pour faire face aux grandes mutations
En toute solidarité avec ses collègues du collégial, Denis Simard a conclu sa présentation en proposant plusieurs pistes de réflexion critique permettant de faire face aux effets des mutations en cours. Outre l'importance de prendre en compte la pluralité des rapports au savoir et la centralité des sciences humaines, qui ont acquis une nouvelle pertinence face aux crises et mutations actuelles, le professeur est revenu sur les enjeux du numérique : « Un accompagnement critique et culturel des étudiantes et étudiants dans la forêt du numérique est indispensable. Il est nécessaire de renforcer la capacité à sélectionner, à hiérarchiser, à intégrer et à interpréter les informations et pas seulement travailler sur l'accumulation des connaissances. »
Soulignant également l'importance de renforcer la culture civique et politique dans toutes les disciplines, afin de lutter contre le repli sur soi et la polarisation exacerbée par les réseaux sociaux, Denis Simard a conclu en appelant nos institutions d’éducation « à jouer pleinement leur rôle pour maintenir la rigueur et l'objectivité dans l'enseignement, afin de former des citoyennes et des citoyens éclairés et critiques ».