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Pierre Avignon, conseiller syndical FEC-CSQ
Samedi prochain aura lieu une mobilisation contre la fermeture de sept entrepôts d’Amazon au Québec. La syndicalisation du personnel, une première mondiale, apparaît comme la principale raison de cette décision injustifiable de la multinationale américaine. Alors que certains en profiteront sans doute pour montrer du doigt les organisations syndicales, nous souhaitons plutôt rappeler leur grande pertinence dans le contexte actuel.
Tout d’abord, comment ne pas parler des menaces qui planent sur des milliers de travailleurs et de travailleuses depuis l’élection de Donald Trump à la Maison-Blanche. Tant sur le plan strictement syndical que social, les organisations syndicales présentes sur tout le territoire et dans tous les grands secteurs sur lesquels des tarifs pourraient s’appliquer seront parmi les premiers acteurs sociaux au front pour défendre les personnes touchées, soit pour protéger leur travail, soit pour défendre ou bonifier leurs droits sociaux ou encore pour favoriser leur accès à de la formation pour se requalifier. Plusieurs cas de figure similaires, démontrant l’importance de la présence syndicale, pourraient malheureusement s’appliquer aux bouleversements que le développement fulgurant de l’Intelligence artificielle a déjà et aura de plus en plus sur le monde du travail.
Ce sont également ces mêmes centrales syndicales qui, en 2014, se sont mobilisées contre l’austérité imposée dans les services publics par le gouvernement libéral. Aujourd’hui, ce sont encore elles qui permettent de révéler les coupures caquistes, notamment dans le secteur de la santé et de l’éducation malgré des besoins criants.
Mais au-delà des nécessaires luttes défensives, les militantes et militants syndicaux mènent au quotidien un travail tout aussi nécessaire, celui de donner plus de sens au travail des milliers de Québécoises et Québécois qui se lèvent jour après jour pour payer leurs factures … alors que, dès le 2 janvier 2025 à 10h11, les présidents-directeurs généraux (PDG) des plus grandes entreprises québécoises avaient déjà gagné l’équivalent du salaire annuel moyen au Québec. Alors qu’un récent rapport de l’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail (IRSST) révélait que les coûts annuels des lésions psychologiques liées au travail avaient augmenté de 195 % entre 2014 et 2019 (coutant un peu plus d’un milliard de dollars à la société), sur le terrain les syndicats s’acharnent à tenter d’améliorer les conditions de travail. Cette amélioration passe bien sûr par un renforcement des conditions objectives des emplois que sont notamment le salaire et les horaires de travail, mais également par les conditions subjectives que l’on peut davantage relier au climat de travail. Car, pour donner du sens au travail, le salaire ne suffit pas. Favoriser la participation des employées et des employés aux prises de décision, renforcer l’autonomie professionnelle et assurer une reconnaissance des tâches réalisées sont autant de facteurs qui favorisent un bon climat de travail et réduisent les risques psychosociaux liés au travail. Bien que l’on en entende moins parler dans l’espace public, les revendications syndicales touchent autant le côté objectif que subjectif du travail. Les organisations de travailleuses et de travailleurs sont également créatrices de liens sociaux et de solidarité plus que jamais nécessaires.
Pendant que certaines nouvelles tendances managériales tentent de faire passer un transfert de responsabilités pour de l’autonomie dans la réalisation de son métier, ne nous y trompons pas, l’assujettissement est encore bien présent. Et pour celles et ceux qui considèrent comme dépassés les modes de résistance collective basés sur l’opposition, sachez que le modèle opposé de résistance individuelle mène quant à lui à un désengagement qui ne peut être profitable à personne. Plutôt que de voir dans la fermeture d’Amazon un frein imposé au mouvement syndical québécois, nous en appelons plutôt à le considérer comme un rappel de sa pertinence face aux défis de notre temps.
La manifestation, organisée par la CSN, se déroulera le 15 février 2025 à 13 h près de la station de métro Mont-Royal, à Montréal.
Pour la CSQ, la mise à pied du personnel des sept entrepôts d’Amazon est une attaque frontale aux droits des travailleuses et des travailleurs ainsi qu’à l’endroit du mouvement syndical, et cela ne peut rester sans réponse!
Celles et ceux qui le souhaitent peuvent se joindre au contingent de la CSQ qui se rassemblera devant la Caisse Desjardins du Plateau-Mont-Royal (435, avenue du Mont-Royal Est, à Montréal).