Grève et reprise des cours : une décision arbitrale qui tombe à point !

7 décembre 2023

Youri Blanchet, président de la FEC-CSQ

Alors que nous sommes en plein mouvement de grève, une décision arbitrale rendue cette semaine est réellement encourageante pour notre mobilisation. Cette dernière nous permettra de contester toutes demandes de reprise bénévole des cours annulés. Depuis 2005, les syndicats d’enseignants du collégial, dont ceux affiliés à la FEC-CSQ, mènent un combat juridique important pour faire reconnaître qu’il est illégal pour les directions de cégeps d'exiger que les profs soient contraints de travailler sans compensation afin de reprendre les cours perdus durant les grèves.

" Des profs de cégeps en grève se battent pour ne plus reprendre «bénévolement» les cours annulés", Le Devoir, 7 décembre 2023 >>

La décision rendue le 4 décembre dernier qui implique le Syndicat des enseignantes et enseignants du cégep de Drummondville (SEECD) concerne les jours de grève de 2021. Dans cette décision, l'arbitre reconnaît les revendications syndicales en plus de statuer sur le fait que les collèges qui agissent ainsi contreviennent aux droits fondamentaux des profs. Il s’agit donc à la fois d’une reconnaissance du droit de grève, mais également de la valeur de notre travail.

Extraits de la décision du tribunal d'arbitrage du 4 décembre 2023 

« S’il peut exiger, des enseignantes et enseignants ayant exercé leur droit de grève, la reprise, à l’intérieur de leur période de disponibilité, des activités pédagogiques qui étaient prévues à leur tâche mais qui n’ont pas été exécutées de ce fait, le Collège doit, en contrepartie, les libérer d’une charge de travail équivalente ou, à défaut, les rémunérer pour cet ajout au travail planifié. »

« En l’espèce, il appartenait au Collège, qui ne l’a pas fait, d’évaluer, d’identifier et de communiquer clairement aux enseignantes et enseignants les modalités d’un allègement adéquat de leur tâche à l’intérieur de leur période de disponibilité, s’il estimait que la chose était possible. Le Collège ne pouvait pas, comme il l’a fait, dénaturer le sens de la reconnaissance de l’autonomie professionnelle en demandant aux enseignantes et enseignants de trouver les moyens de compléter intégralement leur tâche annuelle à l’intérieur d’une période de disponibilité réduite. »

La décision de l’arbitre, André Côté, sur la reprise sans rémunération supplémentaire des tâches prévues durant une grève va jusqu'à reconnaître que cette pratique est inconstitutionnelle, car elle est contraire au droit fondamental de grève. L’arbitre prévoit même qu’un dédommagement doit être versé spécifiquement pour compenser l’atteinte au droit fondamental. Cela constitue aussi un revirement de jurisprudence, car l’arbitre précise que l’ensemble des tâches pédagogiques est constitutif de la tâche enseignante, et non juste les cours. Cette décision vient notamment contredire une décision rendue pour la grève de 2015 qui concernait le Syndicat des enseignantes et enseignants du cégep de Victoriaville (SEECV).

La décision est toutefois très récente et on ne sait pas si le cégep de Drummondville ira en révision judiciaire, ce qui pourrait entraîner un délai important (de plusieurs années) avant que la cause soit tranchée définitivement. Cela ne nous empêchera pas de notre côté de miser sur cette juste décision en incitant tous nos syndicats à déposer de nouveaux griefs pour contester les décisions similaires des cégeps en lien avec la grève actuelle.

Bonne mobilisation en Front commun et solidarité !

Lire l'article du journal Le Devoir du 7 décembre 2023, " Des profs de cégeps en grève se battent pour ne plus reprendre «bénévolement» les cours annulés" >>