En tant que professeur(e)s de cégep durant la pandémie, notre tâche a explosé. Les ajustements ont été nombreux afin d’assurer aux étudiant(e)s une continuité dans les services offerts. Le printemps a été épuisant : apprentissage de nouveaux outils technologiques, révision des plans de cours, redéfinition de notre pédagogie, soutien technique et émotionnel aux étudiants, création des évaluations en ligne, incertitude quant à l’acquisition de compétences, gestion du plagiat par souci d’équité, et bien d’autres.
Cet automne devait être différent. Nous savions mieux ce qui s’en venait. Nous nous sommes préparés pour faire face aux changements apportés à notre profession. Car non, l’enseignement en ligne n’est pas dans notre contrat, ni d’ailleurs dans celui des étudiant(e)s! Nous n’avons jamais été aussi disponibles pour les aider. Le travail nous suit à la maison, parfois jusqu’aux petites heures du matin. Ces conditions se poursuivront-elles après la pandémie? Quelle sera notre nouvelle réalité?
Pour ce qui est de nos étudiant(e)s, ils ont aussi subi de profonds changements à leurs conditions d’apprentissage. Alors que nous connaissons tous les conséquences de la sédentarité sur la santé, la situation leur impose de suivre leurs cours dans leur chambre. À cela s’ajoutent de nombreux problèmes liés au contexte actuel : isolement social, accès limité aux technologies, difficultés d’apprentissage exacerbées par la formation à distance, etc. Tout cela engendre un manque de motivation qu’on doit contrer au quotidien, en plus d’enseigner.
Ce qui nous amène à notre sujet d’aujourd’hui. Nous sommes la main-d’œuvre sur laquelle l’État compte afin d’éduquer celle de demain. Au milieu de cette pandémie, pendant que les profs se démènent pour fournir une éducation de qualité tout en soutenant nos jeunes à bout de bras, on ne constate aucun avancement aux tables de négociation, aucun signe de reconnaissance. La marge de manœuvre financière dont dispose la partie patronale est si famélique que les discussions de fond concernant nos conditions de travail sont rapidement mises de côté. Par exemple, des ressources significatives doivent être injectées en lien avec l’enseignement et l’encadrement des étudiants en difficulté, l’utilisation accrue d’outils technologiques ou encore l’augmentation des tâches administratives. Il importe aussi de revaloriser une profession enseignante toujours plus précarisée, où l’instabilité d’emploi est devenue un enjeu grandissant, notamment pour les jeunes profs. Finalement, n’oublions pas que nous sommes moins bien rémunérés que la moyenne des professeur(e)s au Canada. Ces multiples enjeux ont des conséquences directes dans certains départements où il devient difficile de garder ou recruter des enseignant(e)s, le secteur privé offrant de meilleurs salaires.
Après avoir remercié à peu près tous les autres corps d’emploi, il est temps que le gouvernement fasse preuve de reconnaissance à l’égard de ses enseignant(e)s. Cela commence par un engagement sérieux à négocier et à se donner les moyens d’offrir une éducation collégiale à la hauteur des attentes de la société.
En éducation, nous croyons qu’il faut que ça change maintenant.
Les membres de l'exécutif du Syndicat des enseignantes et enseignants du Collège Champlain de Lennoxville (SECCL)