Notre solidarité ne doit pas être virtuelle

1 septembre 2020

Lucie Piché, présidente de la FEC-CSQ

Alors que le présentiel, l’hybride, le comodal, le synchrone et l’asynchrone nous font tourner la tête, j’aurais pu vous parler de 1001 sujets qui nous préoccupent à l’occasion de cette rentrée hors norme de l’automne 2020. De la nouvelle ministre de l’Enseignement supérieur (qui a enfin pris le temps de nous rencontrer), à la reprise de notre négociation collective en passant par la poursuite des travaux gouvernementaux sur le eCampus. Nous aurons toutefois tout le loisir de parler de cela au fil de l’année à venir. Je préfère donc vous parler ici de tout autre chose.

Le confinement, puis le retour à un quotidien hors norme, nous ont toutes et tous mis dans des situations inhabituelles. Nous nous sommes alors retrouvé.e.s seules et seuls devant nos écrans, isolé.e.s et privé.e.s de liens essentiels qui font toute la force de notre profession, non seulement avec les étudiantes et les étudiants, mais également avec nos collègues. Si nous nous sommes dès lors retroussé les manches pour « sauver » la session d’hiver, trop souvent dans la solitude de nos bureaux virtuels improvisés, la session d’automne qui débute amène quant à elle son nouveau lot de défis. Les organisations syndicales locales et nationales qui représentent les profs sont là pour rappeler à nouveau leurs besoins aux personnes concernées. C’est de ces représentations et des liens sociaux créés par les activités syndicales que je souhaite vous entretenir plus précisément ici.

Derrière les instances et les procédures d’assemblées jugées parfois lourdes par plusieurs, nos organisations syndicales sont en effet créatrices de liens sociaux qui sont d’une importance trop souvent ignorée mais qui, comme beaucoup de choses, se révèlent pendant les périodes de crise. Des assemblées générales locales rassemblant les profs de tous les départements, aux instances nationales regroupant des profs de partout au Québec, la mise en action de nos réseaux structurés a permis, dès le début de la crise sanitaire, d’élaborer des revendications pour soutenir le travail des profs, mais aussi de limiter l’isolement des uns et des autres, favorisant une plus grande cohésion au sein du réseau collégial. Or, n’est-ce pas là le point de départ de l’action syndicale que de créer du sens commun !

Cette action syndicale, que d’aucuns analysent à travers le prisme de quelques articles de journaux parcourus d’un ou deux clics, est loin de résumer l’ensemble des actions menées par des milliers de militantes et de militants à travers le Québec. Partout dans la province, des représentantes et des représentants élus par leurs pairs se sont affairés à interpeller les directions pour améliorer les milieux de travail depuis mars dernier et continuent de le faire pour la présente rentrée. Partout, un temps insoupçonné d’écoute et d’échange est consacré à tenter de trouver des solutions aux problèmes vécus par les collègues. C’est là une richesse du mouvement syndical méconnue qu’il convient de mettre en lumière. La richesse des liens sociaux que nous contribuons à créer!

Enfin, avant de conclure, il faut rappeler que le mouvement syndical est l’un des acteurs incontournables du monde du travail qui a, par le passé et encore aujourd’hui, revendiqué un renforcement du filet de sécurité sociale pour l’ensemble des travailleuses et des travailleurs. Cette protection est plus que jamais importante et nécessaire pour toutes celles et ceux dont la situation a été fragilisée par cette crise. Il en est de même des mesures de conciliation famille-travail dont nous demandons depuis de nombreuses années un renforcement, notamment pour soutenir les femmes qui se retrouvent, plus souvent qu’à leur tour, responsables des charges familiales, la crise sanitaire n’ayant fait qu’accentuer cette situation comme elle a accentué plusieurs autres formes d’inégalités. Les liens de solidarité syndicale sont donc aussi des liens pour les employées et employés non syndiqués, mais également pour toutes les personnes laissées pour compte.

Terminons ici avec de bonnes nouvelles : 1) nous avons enfin un ministère de l’Enseignement supérieur 2) Les effectifs étudiants ont augmenté de 3 % dans le réseau collégial cette année 3) Au moment de lire ces lignes, votre premier cours en ligne sera déjà donné !

Si nos classes seront cet automne pour la plupart du temps virtuelles, notre solidarité doit, quant à elle, être bien réelle. Restons toutes et tous soudés afin que soit fécond le maillage de nos luttes collectives!